La cacherouth

Un dossier préparé par K. Acher
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Mise à jour le


A propos de l'interdiction des quartiers arrières.


Un communiqué du Conseil supérieur rabbinique rappelle ce 21 Nov 2019 que "la règle établie par les autorités rabbiniques françaises depuis les temps les plus reculés est que l'on ne consomme pas la partie arrière des animaux" (https://www.consistoire.org/newsletter/ed221119.php)

Ce communiqué émis à l'occasion du congrès annuel des rabbins de France semble donner réponse à des velléités de certains d'interférer avec les décisions rabbiniques.
Ces velléités s'expriment de plus en plus, véhiculées par les réseaux sociaux. On y trouve pèle mêle la question de la parité, les conditions de délivrance – ou d'obtention- du guett, divorce religieux, divers choix du Rabbinat en matière de cacherouth.
Sur le point précis des quartiers arrière des quadrupèdes, non permis en France il y a effectivement controverse rabbinique, et ce depuis plusieurs siècles.
Le monde ashkénaze dans sa grande majorité suit Rav Moché Isserles, le Ramo, qui les interdit compte tenu de la difficulté d'obtenir une dissection -nikour- convenable qui ôte les graisses interdites, certains vaisseaux sanguins et surtout certain nerf et ses ramifications (d'aucun disent le nerf sciatique, ce qui est un grand résumé de ces parties interdites).
Dans le monde séfarade, l'usage est de pratiquer le nikour.
S'ajoute à cette compétence la nécessité que cette dissection soit effectuée par une personne ayant grande connaissance des lois et de l'anatomie, alliée à une grande perception de l'importance de cette interdiction.
En pratique, à moins d'être un boucher d'une grande piété, ce travail est attendu d'un surveillant rituel (machguia'h) ou du cho'het. Parfois le surveillant se contente de contrôler le travail du boucher. Nous connaissons une boucherie où le nikour est effectuée par un garçon boucher non juif, et qui a une très grande connaissance du travail, mais n'est pas dispensé pour autant du contrôle par le surveillant.
Il est évident que dans le monde séfarade ces exigences de piété sont aussi de cours.
Toutefois à l'échelle d'une grande métropole, il est très difficile -et peu populaire – de s'intéresser au degré d'observance des intervenants dans la chaine carnée. Imaginez-vous qu'un rabbin vienne vous demander et souhaite contrôler effectivement – si vous mangez cacher, si vos enfants sont scolarisés dans une école juive, si votre femme est bien juive, se couvre la tête, fréquente le mikvé, si vous observez scrupuleusement le Chabbath …
On comprend que l'autorité rabbinique qui forme et contrôle très peu ses propres inspecteurs puisse choisir le raccourci de maintenir le statu quo.
Les temps les plus reculés? La mémoire du judaïsme parisien est indissociable de l'héritage des rabbins de l'Europe de l'Est, au-delà même de l'Alsace, et on peut admettre que les quartiers arrière sont bannis de notre assiette depuis plusieurs siècles.

En France donc, on ne consomme pas les quartiers arrière, qui sont remis en circulation par les chevillards auprès de boucheries non juives. Cette facilité permet de n'acheter que la moitié de la bête, et a un effet positif sur le prix de la viande cachère.
En Israël où cette facilité n'existe pas, le Rabbinat permet plus facilement le recours au nikour. Mais ce n'est pas la règle pour tous les rabbinats.
Que ferait un français qui irait en Israël: consommer ou pas un filet mignon? Il posera bien sûr la question à SON Rabbin, tout comme un ashkenaze invité durant Pessa’h à manger des kitnyoth…
A noter que les parties avant qui sont commercialisées doivent aussi passer par une dissection soigneuse pour ôter des parties interdites. Mais ce nikour délicat est toutefois plus facile que le nikour des quartiers arrière.

De fait les prérogatives du Consistoire -et le budget- se rétrécissent avec le temps. Et ce n'est pas la faute d'une communication défaillante ou inexistante qui a prévalu, et prévaut encore.
Ainsi les conflits avec les rabbinats parallèles, la plupart orthodoxes,
- qui maintiennent un abattage indépendant. (Cela avait commencé avec le Rav Munk, qui avait diffusé une liste des chohet qu'il agréait…). On se souviendra encore du procès intenté -et perdu- par Chaarei Chalom veTsedek pour revendiquer un abattage cacher (http://kacher.fr/ActuK2003.htm#chchts2003).
- qui font des mariages … hors consistoire, construisent des communautés sur mesure et des réseaux éducatifs etc…
- Le principe de l'interdiction de "che'hitat 'houts" interdisant toute viande abattue en dehors de l'autorité rabbinique locale a été battu en brèche par la multiplication des abattages effectués à l'étranger. La lourdeur des procédures mises en place en France, les taxations d'état diverses, les velléités de bien-être animal des bobos, les réticences d'une partie de l'industrie de la viande ne sont pas étrangères à cette tendance.
Reconnaissons qu'il y là l'avantage que le nikour, est dévolu à des équipes spécialisées, comme la cachérisation par salage effectuée sous la surveillance de surveillants qui veillent jusqu'à l'emballage et la congélation des viandes. On est loin du boucher qui travaille sa viande dans le secret de son arrière boutique.

Lorsque le programme des candidats à des postes de responsabilité communautaire prévoit des intrusions dans le champ rabbinique, on peut voir se profiler, au-delà de la viande et des quartiers arrière, une nouvelle aventure vers les conversions, le divorce religieux, les autres normes de cacherouth pour s'aligner sur d'autres rabbinats européens plus tolérants ou des options libérales.

Vous n'y croyez pas?
Au début des années 80, il existait une liste des conversions non admises pas le Consistoire.
Suite à l'élection (par un aéropage de présidents de communauté et de rabbins) d'un nouveau Grand Rabbin, un des noms a disparu de cette liste. Comme quoi le séculier avait interféré avec le religieux.

La viande d'abord, et quoi d'autre après?

Pour vous dire ce que certains comprennent du nikour, consultez http://www.boucheriecacher.com/category/le-nikour/
Ou plus sérieusement
https://www.youtube.com/watch?v=rOaNSZo6pGY
https://www.chabad.org/search/keyword_cdo/kid/9967/jewish/Nikkur-deveining.htm

Un dossier préparé par K. Acher