La cacherouth Un
dossier préparé par K.
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Un doute de doute
L'histoire
se passe en 1952.
Le Rav Tsvi Grinwald, aujourd'hui à Kfar Habad, était alors jeune
moniteur à la Yéchivah Hatam Sofer de Jérusalem. Il emmenait
régulièrement les enfants de sa classe visiter le Roch Yéchivah,
le Rav Akiva Sofer, le Daat Sofer, arrière-petit-fils du Hatam Sofer
de Presbourg. Le Rav interrogeait les enfants et suivait leurs progrès.
A la fin d'un de ces entretiens, le Rav Sofer raconta à Rav Grinwald
ses souvenirs.
Il avait succédé très jeune à son père, le
Rav Simha Bounem Sofer, au poste de Rav de Presbourg et directeur de la Yéchivah
Hatam Sofer.
Une année où
il se trouvait dans une ville de cure, Marienbad ou Karlsbad, il aperçût
le Rabbi Chalom Dov Ber (Rachab) de Loubavitch assis sur un banc. Ceux-ci se
levèrent à son approche, et il en fut surpris: un Rabbi de l'âge
du Rabbi Rachab se lever devant un jeune homme comme lui le mit mal à
l'aise. Ils entamèrent la conversation sur la tenue de la Yéchivah
de Presbourg face à la montée de la Réforme, et le Rav
Sofer les invita dans son hôtel pour en parler. Quelques jours plus tard,
il leur rendit la politesse en allant les visiter dans leur hôtel.
Il fut accueilli par la Rabbanit Sterna Sarah, épouse du Rabbi Rachab.
Oh, Rav de Presbourg, vous venez visiter le Rabbi? J'ai une demande très
importante à vous faire. Mon mari souffre d'atroces douleurs dentaires,
et refuse de se faire soigner par crainte qu'on lui pose un plombage, qui pourrait
entraîner des questions de mélange de lait et de viande, ou de
Hamets dans sa bouche. Expliquez-lui qu'il n'y a pas de problèmes de
Halakhah, vous le savez bien, et que rien ne lui impose de supporter telles
souffrances.
J'eus beau dire à la Rabbanith qu'il n'était pas de mon domaine
de donner des conseils, et des opinions de Halakhah à un homme de la
taille du Rabbi Rachab, rien n'y fit, et je fus obligé de promettre que
je lui en parlerai.
A la fin de l'entretien avec le Rebbe, je le priai de m'excuser, mais que j'étais
obligé de lui parler de sa santé. Et de lui expliquer que lorsqu'on
mange un bouillon chaud, il a quitté le Keli richon (la casserole) sur
le feu pour être mis dans une soupière, de la soupière à
la louche, de la louche à l'assiette, de l'assiette à la cuillère,
puis à la bouche. Le liquide n'est plus chaud au point d'imprégner
le métal de l'occlusion dentaire, et n'y laisse aucun goût. Il
n'a pas le statut d'un objet "viande" ou "lait", ni même
'hamets. Il reste tout au plus un "doute de doute" et donc la Halakhah
ne s'oppose pas au recours aux soins dentaires, surtout lorsqu'il s'agit de
guérir des douleurs.
Et vous savez ce que le Rebbe m'a répondu?
Rav de Presbourg! Vous savez que le cho'het doit préparer son couteau
jusqu'à ce qu'il n'y ait plus aucune "peguima", aucune irrégularité
de la lame du couteau lorsqu'il l'examine avec ses ongles.
Il peut arriver que le cho'het ne trouve pas de peguima, mais sente "que
ce n'est pas ça". Cette sensation que "que ce n'est pas ça"
n'est qu'un doute de doute. Le Rav a permis ce poulet, vous avez mangé
un "doute de doute", mais c'est fini et n'aura pas de suite.
Mais ici, pour ces soins dentaires, je vais me promener toute ma vie, chaque
instant de ma vie, nuit et jour, avec cette sensation de "doute de doute".
Croyez-moi, cela fait bien plus mal qu'une rage de dents.
Et le Rav Sofer se tourna vers les enfants.
"Vous entendez de l'autre côté de la rue les cris de douleurs
des patients du dentiste Dr Hananel? (Les dentistes n'avaient pas lors des appareils
et des médicaments aussi performants qu'aujourd'hui, et le voisinage
des dentistes "vivait" les soins prodigués par le dentiste
Hananel).
Un "doute de doute" sur une transgression de la loi juive fait encore
plus mal que les dents!"
Le Rav Akiva Sofer se mit à trembler de tout son corps, comme s'il vivait
la scène une nouvelle fois.
"Vous comprenez maintenant ce qu'est un Rabbi?" dit-il aux enfants.
Traduit de
(vidéo): http://www.chabad.org/therebbe/livingtorah/player_cdo/aid/1467881/jewish/What-a-Rebbe-Is.htm
Publication Si'hat Hachavoua 1453, Hechvan 5775 http://www.chabad.org.il/Magazines/Article.asp?ArticleID=10981&CategoryID=1901