La cacherouth Un
dossier préparé par K.
Acher
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Les oies et les rabbins
En Europe, il était de coutume d’engraisser
les oies dans les mois précédant Pessa’h, puisque de
nombreuses familles ne consommaient pas d’autre matière grasse
que la graisse d’oie. Pendant six ou huit semaines, les oies devaient
manger une bassine de blé deux fois par jour, si bien que vers le
début de la fête, elles étaient si énormes qu’elles
pouvaient à peine marcher.
Deux sommités rabbiniques, le ‘Hatam Sofer (Rabbi Moché
Schreiber, 1762 - 1839) et le Yisma’h Moché (Rabbi Moché
Teitelbaum, 1759 - 1841) différaient dans leurs opinions : la pratique
du gavage rendait-elle les oies non-cachères? La question tournait
autour du fait que l'introduction de force des grains dans la gorge des
volailles abîmaient sans doute l’œsophage, ce qui rendait
les animaux non cachères (car incapables de vivre encore un an).
‘Hatam Sofer |
Yisma’h Moché |
Le ‘Hatam Sofer tranchait que l’œsophage
n’était pas nécessairement abîmé et il
estima donc que cette pratique était permise. (Bien sûr,
les oies devaient être examinées soigneusement après
l’abattage pour prouver qu’elles étaient effectivement
cachères, par la procédure décrite plus loin).
Son contemporain, le Yisma’h Moché estimait que certainement
l’œsophage devait être blessé par l'introduction
des céréales : il déclara donc ce procédé
strictement interdit. Les deux célèbres rabbins échangèrent
plusieurs lettres, apportant à chaque fois d’autres arguments,
d’autres preuves trouvées dans d’autres livres de responsa.
Leur discussion restait toujours courtoise car tous deux cherchaient uniquement
à définir la Halakhah pour le Nom de D.ieu et non pour leur
gloire personnelle.
Finalement, le ‘Hatam Sofer suggéra qu’au lieu de rester
au niveau de la théorie, ils devaient passer à la pratique
: chacun des deux devait faire engraisser dix oies puis procéder
à la Che’hita (l’abattage rituel). Ensuite, lors de l’examen
des organes internes, ils dégageraient les œsophages, les rempliraient
d’air et les ferait flotter dans une bassine pleine d’eau. Si
les œsophages étaient troués, des bulles d’air
s’échapperaient dans l’eau, apportant ainsi la preuve
que les volailles n’étaient pas cachères. L’absence
de bulles les rendrait cachères.
Le Yisma’h Moché accepta le test mais le résultat de
la procédure fut absolument étonnant : tous les volatiles
engraissés et abattus sous l’autorité du ‘Hatam
Sofer étaient cachères sans l’ombre d’un doute
alors que ceux du Yisma’h Moché étaient tous, absolument
tous blessés et donc "taref", non cachères.
On expliqua alors que, de fait, la décision et la parole de ces deux
sommités rabbiniques avaient changé la réalité
physique: leur appréhension de la Halakhah (la loi juive) avait influencé
la situation concrète!